Le musée du charpentier
Le musée du Charpentier
Bègles 33
La première pièce de la collection de Bruno Maugin, c’est Bruno Maugin. Son béret, sa moustache, son accent et son talent de guide. Ses autres trésors ont des noms magnifiques et pittoresques : hapchot ou bridon à huppe, trusquin et bisaiguë, boutoirs et langues de belle-mère…
« Ce sont les outils de tous les métiers du bois. Je dois en avoir 2000 », dit-il, faisant inlassablement le tour des vitrines et des étagères installées dans l’atelier de son entreprise de charpente, Tamdem, tout près du parc de Mussonville.
Au rez-de-chaussée, les machines modernes qui servent à l’ancien compagnon menuisier et à ses employés pour leurs chantiers. Des caisses, aussi, d’où émergent des lots de pièces indéfinissables. Repérées dans des vide-greniers, ou abandonnées devant la porte par des inconnus : « Depuis qu’on sait que je collectionne, ça arrive de plus en plus souvent ».
Aussitôt franchie la porte du petit escalier, qui grimpe à la mezzanine, l’exposition commence. Il y a de tout, classé par métier. Les outils des résiniers et gemmeurs landais, des scieurs de long, des fagotiers, des tonneliers, des sabotiers…
Dans un cahier, Bruno Maugin a recensé tous les métiers du bois que l’on connaisse, plus d’une soixantaine. La plupart ont disparu, leur matériel est resté. Des merveilles d’ingéniosité, de précision, ou de puissance. On pourrait ici faire des fenêtres à moulure comme au XIXe siècle. À la main. Ou des barriques à l’ancienne. « Ils n’étaient pas feignants », commente le guide, devant une pièce particulièrement puissante et lourde. Une carte postale offre le portait de Juliette Caron, charpentier en 1822 à Senlis : pas feignante non plus.
Heureux tous les matins
« Le plus ancien outil doit être un rabot du XVIe siècle », indique le charpentier.
Il est fier de montrer un « pied de roi » d’avant la révolution, de dévoiler une effigie de Napoléon cachée par le contre-fer d’un rabot. Ou les signatures de ces forgerons qui armaient les artisans de ces fers aux morsures cruelles.
Le catalogue des herminettes et des varlopes est aussi celui des bois dont ils sont faits : cormier, hêtre, citronnier, buis, pommier… Parfois bruts, parfois ornés de sculpture, comme ce catalogue de sabotier proposant des motifs au client.
Et les gestes qui vont avec ces outils d’un autre âge ? « Je saurai en utiliser beaucoup », dit ce quinquagénaire qui affiche 37 ans de métier, depuis qu’enfant bordelais, il se fit « arpète » en menuiserie. « J’ai toujours su que je travaillerai le bois ». Et se lève « heureux tous les jours de faire ce métier ».
Il n’a guère quitté la Gironde lors de son compagnonnage, mais sa passion de collectionneur lui fait désormais courir les ventes et les musées jusqu’à Nantes ou en Autriche. Pour en profiter, il suffit d’aller à Bègles. C’est sur rendez-vous, et il y a juste un petit tronc en carton si on veut « soutenir » le musée.
Tamdem, 32, rue Alexis-Labro à Bègles. Tél. 06 50 18 94 43
Par Gilles Guitton
Publié le 14/03/2011
https://www.sudouest.fr/2011/03/14/le-musee-du-charpentier-341810-2760.php
Date de dernière mise à jour : 25/01/2021